Mon travail repose sur l’idée de trace amnésique. À mi-chemin entre le conscient et l’inconscient, le tableau conduit le spectateur dans un « no man’s land » imaginaire où l’histoire individuelle cède la place à l’histoire collective.
Les espaces peints sont ouverts, espaces publiques arides, détruits, dont toute notion d’intimité à été evacuée, la présence humaine n’étant perceptible que dans les éléments architecturaux de type urbain ou industriel qui structurent la toile. Bien que je travaille sans l’aide de la photographie, les tableaux font cependant référence à ce médium, tant dans leur caractère souvent monochromatique qui les rapproche du document d’archive que dans les rapports qu’ils entretiennent avec le réel.
L’image émerge d’une base gestuelle abstraite. Les évocations de différents espaces peuvent se sur-imposer, le tableau conservant par strates l’empreinte de plusieurs mémoires. Des projections de matière picturale viennent ensuite en brouiller la lisibilité.
Ces attaques symboliques réactualisent la violence d’un désastre dont l’origine est imprécise (guerre, catastrophes écologiques, entropie ?) tandis que la représentation n’en montre que les résultats, les traces: des uines. Le tableau se trouve donc être le lieu d’une opposition entre une “présence », celle d’une destruction manifestée dans la visibilité du processus créateur, et une narration incomplète, qui ne nous parvient que par bribes, mais qui se révèle, par là-même, apte à être interrogée, interprêtée.
Dossier de presse Anne Bertoin