Commissaire d’exposition : Itzhak Goldberg
Peau : enveloppe extérieure du corps des animaux vertébrés, constituée par une partie profonde (derme) et une couche superficielle (épiderme), dit le dictionnaire. L’art contemporain et particulièrement le body-art ont pleinement exploité cette surface, tantôt en la recouvrant de tatouages, tantôt en la fendant par des scarifications. L’exposition La Peau de l’Œuvre n’entend pas ce terme dans son sens littéral. Les travaux choisis proposent plutôt une réflexion sur les liens entre l’épaisseur et la transparence, entre le profond et la superficie, entre l’attouchement et la caresse. Les différentes textures employées par les artistes et qui affichent clairement leur matérialité font que leurs travaux s’adressent autant au doigt qu’à l’œil. Ainsi, avec Marinette Cueco les éléments végétaux, souvent minuscules, ramassés ou cueillis, tressés, tricotés ou noués deviennent la matière constituante de la production. Les trajets imprévisibles, les volutes et les entrelacs, le réseau irrégulier aux mailles plus ou moins serrées, plus ou moins lâches, forment comme des textiles botaniques ou des tableaux organiques. Ailleurs, chez Claude Marchat, par chevauchements et recouvrements, les journaux ou les affiches se transforment en figures déroutantes, le réseau multicolore atteint un équilibre entre couleurs chaudes et zones plus neutres, entre le plein et le vide, le collage se transforme en une peinture épidermique. Ailleurs encore, Stéphane Dumas avec La salle des peaux perdues met en scène des « peaux » synthétiques en caoutchouc ; aériennes et flottantes, traversées par la lumière, ces dépouilles ou empreintes sont à l’image du Saint Suaire de l’ère de la modernité. Diversité des processus et des matières mais où, sans exception, le plaisir du regard est associé à la sensation physique de la tactilité, la vision à la palpitation.
Itzhak Goldberg